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Le plus grand lit du monde

Type de projet

Recueil paru aux Éditions Extensibles

Date

2021

Extrait de l’article écrit par Pauline Guémas pour le
site l’Imprimerie nocturne
Et c’est en moins de soixante pages que nous
sommes immergés dans l’avidité des rentes d’argent,
implicitement injectées dans nos besoins vitaux
comme le sommeil, la faim ou les nerfs qui se
bloquent, ce qui peut potentiellement retourner
l’économie du scénario. Paradoxalement, plus on lit
les descriptions des décors gourmands et luxuriants,
plus on déchante à cause des figures de méchants
invoquées explicitement par Laure Mathieu.
En réalité, la nouvelliste joue avec les (pro)portions
des espaces traversés par les êtres de papiers et dans
les descriptions des matières consommées, portées
ou utilisées. C’est d’ailleurs la chanson intitulée Le
Goudron par Brigitte Fontaine qui chantait dans les
années 1960 que « la terre est un gâteau », alors oui,
on lit le partage d’aujourd’hui du fait que l’on se fasse
manger par un système qui dépasse l’entendement.
C’est pourquoi, des figures de tyrans apparaissent,
instrumentalisés par leur patiente surveillance : des
militaires qui guettent un jeune prisonnier cupide de
ses rêves et d’évasion, ou le spectre d’un grand loup
noir qui observe silencieusement ses futures victimes
mangeant insatiablement le même gâteau, tous les
jours. Parfois, c’est dans le milieu des spécialistes
que l’on rencontre des personnages très confiants
dans leurs gestes professionnels tel le personnage
de l’ostéopathe très vif qui manipule sa patiente
comme une poupée de chiffon, ou des figures
marginales comme les artistes qui sont censés
interroger la société actuelle et qui ont surtout des
airs gargantuesques, et finissant leurs performances
seuls et loin des proches, peut-être pour interroger
d’autres sociétés ou peut-être pas, ce qui peut
évoquer également l’exotisme via les affaires.
Les déplacements des personnages – en somme
: les animaux, objets et humains – semblent
être pris simultanément dans un état cyclique et
constructiviste. Laure Mathieu nous dévoile des
réflexions existentialistes, par exemple avec la
fonction nominale d’un fauteuil dans ce qu’il contient
dans l’essence de sa qualité de bois. L’humain fait
aussi corps avec le fauteuil dans Sans-Titre, à tel
point qu’on peut imaginer des sortes d’être hybrides
comme ceux imaginés par les surréalistes un siècle
auparavant. D’ailleurs, le métissage imaginaire de
l’autrice n’associe pas de créatures légendaires mianimales
mi-humaines et encore moins sous une
forme monstrueuse. Non, ici c’est le réel qui est
sous emprise d’un imaginaire avec des déformations
qu’un.e plasticien.ne peut mettre en oeuvre dans
le réel, pour finir, cet imaginaire est questionné
via les comportements intériorisés mi-humains
mi-animaux de tous les personnages imaginés par
l’autrice.
Les décors imaginés sont dans des maisons,
appartements ou dans la rue. Parfois les objets
qui peuplent ces histoires sont comme ceux
d’une dinette en plastique, et les cuillères sont
un peu trop nettoyées. Parfois, discrètement, il y
a des traces d’usages comme une couette froissée
ou des miettes de fin de repas. Les descriptions
pongiennes pourraient correspondre au regard
encyclopédique que porte Laure Mathieu sur les
environnements qu’elle imagine. Les matières
molles ou dures pourraient faire une liaison avec
l’essai sur l’imagination de la matière par Gaston
Bachelard dans La Terre et les rêveries de la volonté
au sujet des métaphores de la pâte (le gâteau), de
la mollesse (le cuir), et de la dureté (le bois*).
(...)

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